Homélie de carême
Cendres, 1er et 2ème Dimanche
Homélie du Dimanche 13 Mars
Il gravit la montagne pour prier. Pendant qu’il priait… La prière transforme le monde, elle change la vie, elle apporte une lumière nouvelle.
Jésus n’est pas monté seul sur la montagne, Il a invité ses amis, et ses amis sont rentrés dans la prière avec Lui. Dans l’Evangile nous voyons souvent Jésus prier, et souvent Il nous invite à entrer dans la prière. Il dit même : il faut toujours prier sans se lasser, sans en être fatigué. C’est une invitation que nous entendons de nouveau durant ce carême ; Jésus nous invite à aller avec Lui. Que nous ayons le même désir que Lui, le même besoin d’aimer. C’est par amour de son Père, comme Fils unique, consubstantiel au Père, que Jésus prie. Il exprime par là la grande unité qu’Il vit avec Lui. « Le Père et Moi, nous sommes un. » Nous aussi, comme disciple de Jésus, comme enfants de Dieu, fils et filles du Père éternel, nous avons à devenir un avec Lui.
Le carême nous permet d’aller plus loin pour entrer dans la prière de Jésus, pour apprendre à prier avec Jésus. Qu’est-il nécessaire pour prier ? Il n’est pas nécessaire de gravir une montagne chaque matin, même si parfois nous en faisons une montagne. Nous devons apprendre à nous arrêter, à nous mettre en présence de Dieu. Comme lorsque nous disons « bonjour » à quelqu’un : nous nous arrêtons, ne serait-ce que quelques secondes pour le saluer, échanger quelques mots. Pour se mettre en présence de Dieu un espace de silence, au moins intérieure, est nécessaire. Oublier la télévision, oublier le téléphone, oublier le travail qui nous attend… La prière est un acte de foi, elle commence par un acte de foi : « Seigneur, Tu es là. Tu me vois, Tu m’entends. » Dieu me regarde et je le regarde avec les yeux de la foi, avec mon cœur qui L’aime et qui se sait aimé de Lui. La lumière qui resplendit sur le visage de Jésus pendant qu’Il prie jaillit de l’amour de Dieu qui L’habite et Le transfigure dans son humanité.
Pendant qu’Il prie Jésus est transfiguré. Il ne devient pas quelqu’un d’autre, Il manifeste qui Il est. Nous pouvons dire que grâce à la prière nous devenons plus nous-mêmes, nous retrouvons l’unité avec nous-même parce que nous retrouvons l’unité avec notre origine : nous rétablissons la relation avec notre Père du Ciel dont nous sommes les enfants. Il est bon de revenir vers Dieu, de vivre avec Lui pour vivre de Lui.
La prière nous unifie de l’intérieur, elle nous concentre et nous recentre ; elle nous reconduit au centre de notre vie : Dieu. Celui qui prie trouve des ressources nouvelles, il va à la source.
Nous comprenons très bien saint Pierre quand il dit : « Il est bon que nous soyons ici. » Il est bon d’être avec Dieu qui est bon ; il est bon de se laisser remplir par la bonté de Dieu. Dans la prière le réservoir de notre cœur se remplit… Il se remplit pour pouvoir déborder dans notre vie.
Sur la montagne, ils ont dû monter mais ils ne peuvent pas rester ; ce n’est pas le moment de camper. Il faut décamper, redescendre pour porter ce qui a été reçu, pour laisser déborder l’amour de Dieu. Je le reçois pour le donner.
Sainte Thérèse de Jésus (d’Avila) dit qu’il ne faut pas chercher la consolation de Dieu mais le Dieu de la consolation ; c’est-à-dire que Dieu est premier et non pas l’utilité, notre besoin ou notre désir non purifié. C’est ainsi que nous entendons la voix du Père, le conseil qu’Il nous donne : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le ! » Dans la prière nous ne dictons pas à Dieu ce qu’Il devrait faire, nous cherchons sa volonté et à y correspondre. Sainte Thérèse dit encore que dans la prière il ne s’agit pas de beaucoup parler mais de beaucoup aimer. Aimer, c’est vouloir ce que Dieu veut, c’est découvrir la volonté de Dieu dans notre monde et pour notre vie, car Dieu qui est bon ne veut que le bon pour nous.
Alors montons sur la montagne chaque jour. Permettons à Dieu de nous façonner. Il est bon quand nous prions d’ouvrir l’Evangile, d’écouter Jésus, de Le regarder, de L’entendre nous dire les paroles qui éclaireront notre vie.
Allons par Jésus, allons avec Jésus, allons en Jésus. Par Lui, avec Lui et en Lui nous trouverons le chemin pour vivre, nous trouverons la paix et la joie, la confiance pour réaliser dans le monde notre vie et y répandre l’Amour du Père pour tous ses enfants.
6 Mars
Nous sommes entrés en carême mais nous n’y sommes pas entrés seuls. Nous y sommes entrés avec Jésus. Nous n’y sommes pas entrés par notre propre force mais entraînés par Lui, attirés par Dieu. Nous n’y sommes pas entrés pour réaliser une performance, avoir une bonne note, mais pour Dieu. C’est cela qui est le plus important : trouver Dieu dans notre vie, pas Le trouver une seule fois puis l’abandonner, mais Le trouver dans notre vie de tous les jours, retrouver Dieu dans la vie des hommes, le seul Dieu qui aime et qui sauve, qui guérit et qui unit tous ses enfants bien-aimés. Dieu vient à notre rencontre et il nous est donné de L’accueillir de manière plus profonde dans ce temps béni du carême, de resserrer les liens avec Lui.
Le carême nous centre sur Dieu, remet Dieu au centre de notre vie. C’est le sens des trois réponses de Jésus au démon. Le démon est celui qui fuit Dieu et il faut démasquer son petit manège dans nos vies (un manège qui tourne exerce une force centrifuge, qui fuit le centre). Tout ce qui fuit Dieu, unique centre de la vie, est comme un manège dans notre vie. Le carême nous invite à arrêter ce manège. Quand Jésus répond au démon, à chaque fois il y est question de donner à Dieu sa place, sa vraie place…
Ecouter sa Parole qui nous nourrit comme le pain et mieux que le pain.
Se prosterner devant Lui et Lui seul, et cultiver sa présence à chaque instant de notre vie.
Ne pas utiliser Dieu comme s’Il devait corriger nos bêtises ou assumer Lui-même notre irresponsabilité. Dieu n’agit pas à notre place mais Il nous donne la sagesse pour bien agir.
Le carême est un temps pour permettre à Dieu d’être présent dans notre vie, d’y agir et de la transformer selon son désir en accomplissant sa volonté. C’est un temps pour vivre la foi, c’est-à-dire accueillir Dieu et tout ce qu’Il veut nous donner, tout ce que Lui seul peut nous donner. Mais aussi vivre chaque partie de notre vie centrée sur Dieu, sur ce qui donne sens à ce que nous faisons, partageons avec les autres, vivons chaque jour.
La foi est le moyen prochain d’atteindre Dieu. Nous n’atteignons pas Dieu dans la possession, en cherchant à posséder toujours plus, ni dans le pouvoir qui veut sans cesse s’affirmer sur les autres, étendre sa domination. Nous atteignons Dieu dans l’humilité de la foi.
Trop souvent notre foi est tiède ; nous la vivons sans beaucoup de conviction, faiblement. Nous nous installons dans de petites habitudes. Le carême vient nous réveiller de cette léthargie, nous faire sortir de l’hibernation de la foi. Ce n’est plus le moment de laisser au garage notre amour de Dieu qui doit déborder en amour du prochain. En nous centrant sur Dieu nous nous décentrerons de nous-mêmes et nous nous ouvrirons aux autres, à ceux qui nous entourent.
Si de ta bouche, tu affirmes que Jésus est Seigneur, si, dans ton cœur, tu crois que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, alors tu seras sauvé. La foi consiste à accueillir la révélation de Dieu, ce que Dieu nous dit de Lui, ce qu’Il nous fait connaître. Nous accueillons par la foi Dieu Lui-même, et le chemin qu’Il nous montre pour être sauvé, pour vivre en homme véritable, pour accomplir dans notre vie ce qui est juste et bon.
Dans quelques instants, dans la célébration de la Sainte Messe, nous élèverons notre cœur, nous le tournerons vers le Seigneur. Nous rendrons ainsi à Dieu le culte qui Lui plaît. Que toute notre vie s’élève vers Lui, que toutes nos actions de chaque jour nous tournent vers Lui et nous rapprochent de Lui. C’est ainsi que nous servons Dieu, que nous Le mettons au centre, que nous Lui rendons le culte véritable. Nous n’avons qu’une vie mais trop souvent nous la vivons en petits morceaux, nous faisons des compartiments : un tiroir pour la famille, un tiroir pour le travail, un autre pour les loisirs… Dieu veut faire l’unité dans notre vie.
Au début de ce carême nous sommes invités à prendre les moyens qui nous permettront de faire un pas de plus dans la foi. Nous sommes invités à nous mettre à l’écoute de Dieu dans notre vie, à l’écoute de sa Parole. C’est un acte de foi : accueillir la Parole de Dieu pour ce qu’elle est vraiment. Nous sommes invités à cultiver la présence de Dieu en nous arrêtant pour Lui dans la prière quotidienne. Et, nous sommes invités à accomplir ce qui dépend de nous unis à lui, avec confiance et persévérance… 40 jours et toujours.
Abbé Pierre PEYRET
Homélie du mercredi des cendres Revenez à moi de tout votre cœur !
Une invitation pressante…
Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements. Oublier les apparences pour vivre en vérité sous le regard de Dieu… un regard bienveillant et aimant.
Le Carême nous invite à la conversion, au changement de mentalité, pour que la vie ait sa vérité et sa beauté non pas tant dans la possession que dans le don, non pas tant dans l’accumulation que dans la semence du bien et dans le partage. (Message du Pape 2022)
Trois moyens qu’il nous appartient de mettre en œuvre ; revenez à moi implique une décision personnelle de notre part, de choisir de vivre d’une manière ou d’une autre l’aumône, la prière et le jeûne (le partage, la prière et la pénitence : pour avoir les 3 « P »).
« À semer trop peu, on récolte trop peu ; à semer largement, on récolte largement ». Mais de quelle moisson s’agit-il ? Un premier fruit du bien semé se retrouve en nous-mêmes et dans nos relations quotidiennes, jusque dans les plus petits gestes de bonté. En Dieu, aucun acte d’amour, si petit soit- il, et aucune “fatigue généreuse” ne sont perdus. De même que l’arbre se reconnaît à ses fruits, de même la vie remplie de bonnes œuvres est lumineuse et apporte au monde le parfum du Christ. Servir Dieu, sans péché, fait récolter des fruits de sainteté pour le salut de tous.
Le carême est un chemin que nous parcourons en tant que disciple de Jésus-Christ. Il n’est pas sans but, nous avons une destination : la victoire de pâques, la victoire de la vie en nous et dans notre monde.
La résurrection du Christ anime les espoirs sur terre de la « grande espérance » de la vie éternelle et introduit déjà le germe du salut dans le temps présent. Face à l’amère déception de tant de rêves brisés, face à l’inquiétude devant les défis qui nous attendent, face au découragement dû à la pauvreté de nos moyens, la tentation est de se replier sur son propre égoïsme individualiste et de se réfugier dans l’indifférence aux souffrances des autres.
L’aumône nous empêche de sombrer, elle nous ouvre à la joie des liens qu’elle tisse entre les hommes, à la joie du don. Pour donner il faut d’abord recevoir le Don que Dieu nous fait :
En effet, même les meilleures ressources sont limitées : « Les garçons se fatiguent, se lassent, et les jeunes gens ne cessent de trébucher », mais Dieu « rend des forces à l’homme fatigué, il augmente la vigueur de celui qui est faible. (…) Ceux qui mettent leur espérance dans le Seigneur trouvent des forces nouvelles ; ils déploient comme des ailes d’aigles, ils courent sans se lasser, ils marchent sans se fatiguer ». Le Carême nous appelle à placer notre foi et notre espérance dans le Seigneur, car c’est seulement avec le regard fixé sur Jésus-Christ ressuscité que nous pouvons accueillir l’exhortation de l’Apôtre : « Ne nous lassons pas de faire le bien ».
Le deuxième moyen est la prière :
Ne nous lassons pas de prier. Jésus a enseigné qu’il faut « toujours prier sans se décourager ». Nous devons prier parce que nous avons besoin de Dieu. Se suffire à soi-même est une illusion dangereuse. Si la pandémie nous a fait toucher du doigt notre fragilité personnelle et sociale, que ce Carême nous permette d’expérimenter le réconfort de la foi en Dieu sans laquelle nous ne pouvons pas tenir. Personne ne se sauve tout seul, car nous sommes tous dans la même barque dans les tempêtes de l’histoire. Mais surtout personne n’est sauvé sans Dieu, car seul le mystère pascal de Jésus-Christ donne la victoire sur les eaux sombres de la mort. La foi ne nous dispense pas des tribulations de la vie, mais elle permet de les traverser unis à Dieu dans le Christ, avec la grande espérance qui ne déçoit pas et dont le gage est l’amour que Dieu a répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint.
La célébration de la sainte eucharistie est la source de toute prière parce qu’elle est la prière de Jésus pour l’humanité. Elle rend présent la passion de Jésus pour notre monde, pour notre salut. Notre prière dans le secret de notre cœur rejoint et s’unit à la sienne.
Le troisième moyen est le jeûne qui ouvre un espace à Dieu dans notre vie trop souvent encombrée, tellement remplie que Dieu n’y trouve plus sa place ou une place si petite que Dieu s’y trouve à l’étroit, dans l’incapacité où nous Le mettons de pouvoir agir dans nos vies.
Oui, revenez à moi de tout votre cœur, et je le remplirai de grâces et de joie !
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