Avertir les pécheurs et les revêtir de miséricorde
Nous est manifesté le grand désir de Dieu pour nous : Il veut notre bien, notre salut. « Je ne veux pas la mort du pécheur mais qu’il se convertisse et qu’il vive. » Dieu désire plus que nous notre bien, Il a plus conscience que nous de ce qui est bon et Il constate avec douleur ce qui nous sépare de Lui, ce qui nous détruit. Le péché conduit toujours à la mort : « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. » C’est pour cela qu’Il nous avertit. C’est l’amour qu’Il nous porte qui le pousse à cela. Celui qui aime désire le bien de l’être aimé ; si l’être aimé tombe dans un trou, il ne va pas rester les bras croisés sans rien faire ; il ne peut rester un spectateur passif. Face au mal qui ronge, notre cœur réagit, la charité nous pousse à chercher une solution, à avertir le pécheur. Deux passages de la Sainte Ecriture nous rappellent ce devoir :
Dans l’AT Ezéchiel (3,18) manifeste la solidarité des hommes : « Si tu ne parles pas pour avertir le méchant d’abandonner sa conduite mauvaise afin qu’il vive, le méchant, lui, mourra de sa faute, mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang. Si au contraire tu as averti le méchant et qu’il ne s’est pas converti de sa méchanceté et de sa mauvaise conduite, il mourra, lui, de sa faute, mais toi, tu auras sauvé ta vie. »
Saint Jacques (5,19) : « Mes frères, si quelqu’un parmi vous s’égare loin de la vérité et qu’un autre l’y ramène, qu’il le sache : celui qui ramène un pécheur de son égarement sauvera son âme de la mort et couvrira une multitude de péché. » Il assume ainsi ce que Jésus dit quand Il nous parle de la correction fraternelle (Mt 18,15) : « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le seul à seul… »
C’est toujours mû par la charité, par la miséricorde – puisqu’il s’agit bien d’une œuvre de miséricorde, la 3ème – que nous sommes appelés à agir, à parler. Le chrétien a le souci du Salut, du bonheur de tous, pas un bonheur passager, éphémère, mais éternel. Lutter contre l’indifférence ! « Chacun ses problèmes ! Après tout, c’est lui qui l’a choisi ; il l’a bien cherché. Ou simplement : chacun est libre ! » L’ambiance générale de la société qui se caractérise par l’individualisme triomphant, l’indifférence des uns pour les autres, l’affaiblissement de la conscience morale, engendre ce manque de solidarité, cet égoïsme ou ce mépris. Un chrétien ne peut s’en satisfaire ; le chrétien se soucie toujours du sort des autres, il imite en cela le Seigneur qui est venu sauver ceux qui étaient perdus.
Il existe divers moyens pour avertir le pécheur. Le premier est le bon exemple. Ste Thérèse d’Avila disait à ses sœurs que si elles en voyaient une mal agir que ce soit l’occasion de développer la vertu inverse : commencer par agir encore mieux ! C’est déjà une réparation : noyer le mal sous l’abondance du bien. Avant d’aller voir la personne, il est bon de prier pour elle, de demander au Seigneur le discernement, peut-être même de demander conseil. Nous n’en parlerons d’ailleurs à quelqu’un d’autre que si c’est vraiment pour chercher à arranger les choses (attention au cancanage !) et si cette personne a la discrétion et la connaissance nécessaires. Il est prudent de vérifier aussi que tout le monde n’a pas eu la même idée (avoir dix avertissements n’est pas forcément nécessaire !).
Parfois cette démarche pleine de charité et de délicatesse pourra passer à travers le don d’une lecture opportune ou d’une histoire (Nathan avertit David après son adultère et son meurtre par une histoire de brebis).
Du côté de celui qui est averti un grand ennemi existe : la susceptibilité. C’est un poison ! Demandons à Dieu de nous délivrer de la susceptibilité, elle nous rend incapable d’écouter même ce qui est pour notre bien, elle dresse des murailles contre le bien.
Dieu veut nous revêtir de sa miséricorde, couvrir notre misère. Vêtir celui qui est nu, c’est lui rendre sa dignité. Lorsqu’Adam et Eve ont désobéi à Dieu par orgueil, Il ne les a pas laissés nus, Il les couvrit d’un vêtement. Nous pouvons faire de même. Celui qui s’est laissé revêtir de la miséricorde de Dieu peut participer au festin des Noces de l’Agneau, il a le vêtement de noce, il est entré de nouveau dans l’alliance nouvelle et éternelle. Le Pape y invite particulièrement ceux qui ont participé à un avortement ou commis un péché dont l’absolution est réservée au Saint-Siège, c’est le sens des missionnaires de la miséricorde : que personne ne soit privée de pouvoir se réconcilier.
Abbé Pierre PEYRET +
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